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Presse :

Voyage en classe aiglon

L'équipe, le 18/11/2002 à 12h05

Nous avons passé 48 heures avec les étonnants leaders de L 1, entre Nice et Auxerre. Pour mieux comprendre le phénomène niçois.

Quatre mois de pluie en une journée sur une Côte d'Azur très assombrie, mais le feu à Auxerre... Dans la ville de Guy Roux, l'hôtel qui devait accueillir la délégation niçoise vient de brûler, comme s'il était écrit que le périple des survoltés sudistes en L 1 ne serait jamais avare d'une bizarrerie supplémentaire.
« Auxerre brûle-t-il ? Nice met-il le feu ? » Gernot Rohr, le manitou niçois, a le point d'interrogation en forme de clin d'oeil, parce que, pour l'instant, les montagnes, ici, finissent toujours par être renversées à coups de boutades. « Tu sais, ajoute Rohr à Roger Ricort, l'un de ses adjoints, aucune des équipes qui a logé dans l'hôtel en flammes n'a gagné cette saison à l'Abbé-Deschamps. C'est un signe, tu crois, d'en être interdit d'accès ? »

Gernot Rohr, entraîneur : « On s'entraîne avec les scolaires et les athlètes ! »
Après le hammam parfumé aux senteurs de l'océan Indien, le coach des Aiglons déambule torse nu, protégé d'une simple serviette, dans les couloirs sombres d'un site un brin lugubre. La baraque, qui fait office de siège du club dans un coin du parc des sports Charles-Erhmann, cache au rez-de-chaussée son bureau (modeste) ouvert sur un préau (pas gai), mais l'accueil est joyeux. Les nouvelles sont bonnes. Un petit combat sur la précarité vient d'être gagné. « Regardez le nouvel ordinateur portable du préparateur physique ! On va pouvoir mieux emmagasiner les données. » Devant Bernard Ginès, s'étalent sur la table les ceintures toutes neuves qui enregistreront les fréquences d'effort. Matériel basique ailleurs. Ici, presque un trésor. « On va être au point, dit Rohr. Enfin, presque... »

Dehors, un ami allemand éructe des évidences et d'étranges airs d'intrigues dans un germain très épuré et facile d'accès. « Hier, Monaco, Fussball scheiss. Nul (entendre noul), nul, 1 000 spektator (1) ! » Et, sans crier gare, droit dans les yeux : « À Bilbao, Jupp Heynckes, kaputt ! Und Bilbao kontakt avec Gernot. » La source étant un proche, l'information pourrait secouer le microcosme. Pas à Nice. Rohr nie d'un badin balancé d'épaule. Il préfère les digressions ou rivaliser d'attentions diverses avec ses interlocuteurs. En cette veille de match, l'ardeur médiatique n'est pas à son comble. Onze veut « Emi », le Emerson débusqué à Osnabrück, et la paire d'habitués papotent. Ça tombe bien. Après avoir ouvert leurs vestiaires, leurs tablées, et même leur banc, les Aiglons rechignent désormais un peu à exhiber leurs vertus spartiatement correctes et leurs différences.

Ni bêtes curieuses, mais pros atypiques, très « club d'en bas », ils sont nés un 19 juillet de l'an 2002 (2) et préfèrent encore s'émerveiller d'un rien. Ils grandissent à leur rythme, les yeux écarquillés sur une odyssée en L 1 de plus en plus sidérante. Signe de la mue, on annonce l'embauche prochaine de deux personnes au service billetterie. Pour le reste, il faut compenser. Les gens du staff affichent des CV multicartes. Un des adjoints, Gaby Desmenez, fait aussi office de directeur du centre de formation. Bernard Ginès, le préparateur physique, assure en sus les fins de soirées au piano. « Le père spirituel », Pancho Gonzalès, soixante et onze ans, cumule les travaux d'intendance et l'emploi de narrateur au verbe chantant, quand il entraîne les autres dans ses aventures aux quatre coins du globe rond. Laborieuse, l'ambiance, forcément, est aussi partageuse.

Les voilà tous vendredi au terminal 2 de l'aéroport de Nice, comptoir d'Air France, pour la navette de 15 h 10 au départ pour Paris. Anonymes, ils enregistrent personnellement leurs bagages. Non, le gang des baskets Puma - le reste de la tenue n'a rien d'officiel - ne rejoindra pas Auxerre en avion privé. Mesures d'économie, bien sûr. « S'il le faut, on vendrait des écharpes du club sur la promenade des Anglais », avait dit le capitaine Cobos. Alors partager avec la France les petits retards de la navette... Ni la panne d'avion pour aller à Sochaux (arrivée sur site à 22 heures la veille du match), ni les soucis de grève pour rejoindre Guingamp, ni les cinq heures de bus pour revenir de Lyon (pas d'avion régulier le lendemain matin), ni les contraintes d'horaires les poussant parfois à un dernier entraînement sur des terrains proches de chez l'adversaire, n'ont remis en cause ce principe d'une certaine austérité.

Dans un club de L 1 de bon standing, un voyage tout confort coûte environ 25 000 euros. Mais les Niçois s'expatrient pour un tiers de cette somme, panier-repas compris. « Et vingt fois 100 000 francs d'économie, ça fait une somme », calcule Rohr, le manager comptable. De toute façon, ce relatif inconfort, égayé par les saluts progressivement plus chaleureux du personnel au sol, ne semble pas les perturber. « Dans ce football qui vit à huis clos, ce n'est pas plus mal d'être comme ça, sourit Rohr. À Nice, on est obligé d'être avec tout le monde. On s'entraîne avec les scolaires et les athlètes au parc. Jeudi, à cause de la pluie, on a dû aller dans un gymnase, et il y en avait du monde, dans ce gymnase ! À l'OGCN, on est dans la vie, dans la société. On ressemble à tout le monde... »

Dans l'avion, d'ailleurs, même rejoints par hasard par David Ginola, ils se fondent dans le décor. 17 h 18, la tranquille caravane s'ébroue pour Auxerre, en bus. À l'image d'une France qui découvre ces gaillards initialement formatés pour guerroyer en National, le chauffeur confond Noé Pamarot avec Kaba Diawara. « Vous marquez de beaux buts », dit-il au défenseur, qui se contentera de surclasser Olivier Kapo le lendemain.

À cette heure-ci, les bouchons du vendredi soir engluent l'autoroute A 6. Rohr tente de captiver l'attention en mettant la cassette analytique et pas très divertissante du match Auxerre-Rennes. Et dans la langueur d'un voyage de deux heures, personne ne semblera faire attention aux commentaires du consultant de TPS, Jean-Marc Ferreri, louant un club de l'AJA performant dans le domaine de la récupération « grâce aux avions supersoniques mis à sa disposition par Bourgoin ». Les autres en jet, et eux dans le car. Finalement, l'équipe rallie le camp de base à vingt kilomètres d'Auxerre. Depuis le rendez-vous à l'aéroport, il aura fallu cinq heures pour retrouver le remplaçant de l'hôtel brûlé, caché près de la gare de Joigny. Évidemment, le salon des glaces, garni d'une large banquette molletonnée, hésite entre le rococo et l'inédit. Évidemment, une chambre concomitante n'offre qu'un WC et une télé pour quatre occupants. Mais il n'y a qu'un plaignant au débit contrôlé.

José Cobos : « Un sponsor a donné à chacun de nous un appareil photo. Ça peut faire sourire, mais ça compte pour nous »
Appelé par Europe 1, Rohr parle, philosophe rigolard toujours, « du fin fond de la France, d'un retour sur terre ». Et José Cobos s'étonne que certains croient discerner dans le périple l'effluve d'une aventure. « Les efforts fournis, on n'y pense même plus. C'est ancré. Sans doute parce que l'osmose s'est faite en nous naturellement. Et puis surtout, on voit que, malgré des moyens limités, les gens autour de nous font le maximum pour nous faire plaisir. Le sponsor maillot est arrivé malgré la première défaite contre Le Havre. On nous a offert des voitures. Un sponsor a donné à chacun un appareil photo. Ça peut peut-être faire sourire, mais ça compte, pour nous. Disons qu'on fait, qu'on vit les choses différemment. »

N'empêche, ils ont encore gagné, cette fois-ci à l'Abbé-Deschamps. Sixième match sans défaite, et deux seuls buts encaissés dans la série, en une fois à Lyon. « Plus que treize points, et c'est le maintien », récitent-ils, très cliniquement, sans doute aussi parce qu'ils ont appris à ne pas s'enflammer. Bien sûr, il y a l'ombre furtive d'une petite joie de vestiaire durant les « deux minutes » d'intimité réclamées par Cobos. Puis la galerie des faces apaisées, tranquilles... sauf celle, plus illuminée, de Sammy Traoré, encore un lascar récupéré à la dernière seconde, à Créteil (L 2). Ce samedi, c'est sa fête, celle du gregario débonnaire félicité par les copains plus contents que lui. Un cliché ? Non. « Quand j'ai marqué le deuxième but, ils me griffaient, ils me pinçaient tous. Voulaient plus me lâcher ! Et j'ai fait un pas de hip-hop, comme à l'entraînement. Je leur avais promis ce pas pour ce match. Et je l'ai fait. Et je le referai. » Voilà, il n'y a rien d'autre à comprendre.

Dans le bus du retour, la sonnerie des portables berce l'euphorie contrôlée. Gernot Rohr sert à tous un bon verre de bordeaux, cuvée 1986. Une habitude prise chez les Girondins. Guy Roux, qui passe à la pub radio, ne fait même pas jaser. À l'arrivée à l'hôtel, près de l'aéroport d'Orly, ce dernier mot de Pamarot, un autre costaud inconnu : « En début de saison, je pensais être largement inférieur au niveau de mes adversaires. Et ça s'est plutôt bien passé contre Govou, et contre Kapo aussi. Je me bats bien, quoi. »

« Le succès, on ne peut pas l'acheter », avait dit Rohr. Les Aiglons, paranormaux, sont partis de Paris pour Nice hier à 9 heures, en navette.


(1) Monaco-Ajaccio de la veille (3-2).

(2) Le jour où l'OGC Nice a officiellement été autorisé à accéder en L 1, malgré ses problèmes financiers.

Lundi 18 novembre 2002
© L'équipe






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dim. 07/04/2024 à 15h


Reims - Nice : 0-0

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ven. 19/04/2024 à 21h



Pts J V N D Diff
 3.    Monaco 52 28 15 7 6 +15
 4.    Lille 49 28 13 10 5 +17
 5.    Nice 44 28 12 8 8 +6
 6.    Lens 43 29 12 7 10 +6
 7.    Lyon 41 29 12 5 12 -7



  mer. 13/03 (21h10) PSG - Nice : 3 - 1
   26e  sam. 16/03 (21h) Lens - Nice : 1 - 3
   27e  dim. 31/03 (15h) Nice - Nantes : 1 - 2
   28e  dim. 07/04 (15h) Reims - Nice : 0 - 0
   30e  ven. 19/04 (21h) Nice - Lorient
   29e  mer. 24/04 (21h) Marseille - Nice
   31e  dim. 28/04 (15h) Strasbourg - Nice


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