vico06 Brigadier K12
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1998, Armstrong le retour
L'Américain retrouve la compétition après avoir vaincu son cancer. Pas de Tour de France pour lui mais, déjà, se met en place un système de dopage massif au sein de l'équipe US Postal.
Lance Armstrong lors de Paris-Nice en 1998, avec le maillot de l'US Postal. )
Cette année-là, selon la masseuse de l'équipe Emma O'Reilly, et les coureurs Frankie Andreu, Tyler Hamilton, George Hincapie et Jonathan Vaughters, l'équipe US Postal est déjà rompue à la consommation massive de produits interdits. L'EPO, la testostérone, l'hormone de croissance, la cortisone font partie du décor au quotidien... Sous l'oeil du staff et sous le contrôle du Dr Celaya, le médecin de l'équipe, à qui il arrive d'administrer lui-même les produits aux coureurs.
C'est sur le Tour de France 1998 qu'éclate le scandale Festina. Alors que Richard Virenque et ses équipiers se débattent pour tenter de nier l'inavouable, la panique gagne l'équipe US Postal et en particulier le d'habitude placide Dr Celaya. Craignant une descente de police à l'occasion du deuxième contre-la-montre, le médecin décide ainsi de se débarrasser «de dizaines de milliers de dollars de produits dopants en les jetant dans la chasse d'eau du bus» de l'équipe américaine. Pendant ce temps-là, Lance Armstrong participe à la Cascade Classic, dans l'Oregon, avec Christian Vande Velde et Jonathan Vaughters, mais il a déjà largement intégré le savoir-faire pour se doper. Celui qui "travaille" alors depuis quatre ans avec le Dr Michele Ferrari a l'habitude de transporter partout une bouteille thermos. Un signe qui ne trompe pas pour Jonathan Vaughters, qui lui-même consomme de l'EPO, alors que George Hincapie et Frankie Andreu sont, eux, dans le secret du boss quant à son usage de ce produit.
Expert en lecture du taux hématocrite
Les doutes de Vaughters sont confirmés sur la Vuelta quand Armstrong se montre expert en lecture du taux hématocrite de ses équipiers et s'injecte, sous les yeux de Vaughters, une seringue d'EPO. «Maintenant que tu prends de l'EPO aussi, pas question d'écrire un livre dessus», lance-t-il à son subalterne. Autrement dit, désormais c'est la loi du silence. Lance Armstrong terminera quatrième de ce Tour d'Espagne, résultat qu'il décrit à l'époque comme «la plus incroyable performance de [sa] carrière».
Mais il ne se contente pas d'EPO. Après une dure journée sur cette même Vuelta, le Texan réclame de la cortisone sous forme de pilule à Vaughters et Vande Velde. Incapables de mettre la main sur le produit, les deux coursiers donneront à leur leader un placebo, une pilule d'aspirine écrasée et emballée dans du papier aluminium par Johnny Weltz, leur directeur sportif. Quelques semaines plus tard, aux Championnats du monde à Valkenburg aux Pays-Bas, c'est Kristin, l'épouse d'Armstrong, qui prépare les petits paquets argentés. Ce qui fait beaucoup rire un des coureurs de l'équipe nationale américaine : «La femme de Lance roule des joints !» Lors de ces mêmes Mondiaux, Vaughters se souvient avoir eu quelques sueurs froides en voyant débouler au petit-déjeuner un inspecteur de l'Union cycliste internationale (UCI), chargé des tests antidopage. Plus calme que sur le Tour de France, le Dr Celaya s'éclipse alors discrètement pour aller chercher une bouteille d'un litre d'une solution saline qu'il transporte sous son imperméable devant l'inspecteur de l'UCI avant de l'administrer à Armstrong afin de faire baisser son taux hématocrite.
1999, le Tour à tout prix
En 1999, l'US Postal voit son staff bouleversé. Exit Johnny Weltz et le Dr Celaya, jugé un peu mou du genou par Armstrong dans sa capacité à lui procurer des produits. Un nouveau directeur sportif, Johan Bruyneel, tout jeune retraité des pelotons, arrive. Il est accompagné du Dr Luis Del Moral qui, comme lui, vient de chez ONCE.
Revenu aux affaires tel un miraculé du cancer, Armstrong n'a qu'une obsession, le Tour de France. Armstrong et Bruyneel mettent alors sur pied une préparation spéciale, relate le rapport USADA rendu public ce mercredi. Accompagné de ses deux lieutenants Tyler Hamilton et Kevin Livingston, Lance Armstrong se façonne un profil de grimpeur sous la houlette de Bruyneel et suivant les précieux conseils du Dr Ferrari. Les trois coureurs forment la « A Team », l'élite de l'équipe et bénéficient à ce titre de tous les avantages qui vont avec et notamment d'une attention particulière de la part du médecin italien.
L'EPO, « un diable nécessaire »
Lors d'un camp d'entraînement en Californie, Armstrong pousse son équipier Frankie Andreu à se confier lui aussi aux bons soins du Dr Ferrari. « Il faut que tu sois sérieux », lui explique-t-il. Ce qui signifie dans son esprit, suivre à la lettre le plan de dopage prescrit par le médecin. Andreu aura l'occasion de rencontrer Ferrari quelques semaines plus tard.
Armstrong et Andreu sont en effet à Milan avant la classique Milan-San Remo quand la voiture du premier fait un détour par un parking d'hôtel et station service sur le bord de l'autoroute. Il a rendez-vous avec le médecin italien. Intriguée par ce rendez-vous en catimini, Betsy Andreu demande pourquoi Armstrong ne rencontre pas Ferrari dans le cadre de la course. « Pour que la putain de presse ne le traque pas », répond le Texan qui s'absentera une heure avant de revenir, excité, en s'exclamant : « Mes chiffres sont super ! » Armstrong se moque alors de son équipier qui refuse de suivre le même traitement. Lequel Andreu expliquera à sa femme ne pas vouloir « dépenser d'argent mais surtout ne pas vouloir cette merde dans son corps. » A son amie Betsy qui lui demande ce qu'elle pense de l'EPO, Kristin Armstrong répond que c'est un « diable nécessaire ».
Tyler Hamilton n'aura pas les mêmes scrupules que Andreu. Impressionné par les méthodes scientifiques de Ferrari qui se base notamment sur les paramètres sanguins et le niveau de lactate, Hamilton ne tarde pas à son tour à se faire injecter de l'EPO.
« Motoman »
Le système US Postal tourne à plein régime. Les coureurs sont alimentés en EPO et en testostérone sur les courses par « Pepe » Marti et le Dr Del Moral. Le premier peut se déplacer pour faire ses livraisons jusqu'à Nice où, après un dîner, Betsy Andreu assiste à la remise par Marti d'un sac en papier marron à Armstrong. « De l'or liquide », sourit Armstrong. Emma O'Reily, une masseuse de l'équipe, est également mise à contribution pour le transport des substances entre la France et l'Espagne.
En mai 1999, Hamilton en manque d'EPO, demande à Armstrong de lui en fournir. Pas de problème, il y en a un stock dans le frigo ! La consommation d'EPO par Armstrong était alors de notoriété publique au sein de l'US Postal. Vaughters, Hincapie, Andreu, Hamilton... tous étaient au courant. Moins d'un mois avant le départ du Tour, le taux hématocrite d'Armstrong plafonne à 41. Un peu léger pour être performant. La masseuse demande au coureur ce qu'il compte faire. « Ce que tout le monde fait », lui répond-il.
Sur le Tour, il convient d'être plus discret. Armstrong, Hamilton et Livingston en cas de besoin, feront ainsi appel à « Motoman », un homme qui se déplace à moto pour venir livrer les produits. Le motard suit le parcours du Tour à distance, prêt à intervenir à la demande.
Positif à un corticoïde
Dès le prologue, Armstrong assoit sa domination mais le voilà bientôt rattrapé par un fâcheux contrôle positif à un corticoïde. Un épisode bien connu. Armstrong et Bruyneel, avec la complicité du Dr Del Moral, décident alors de fabriquer un faux, une autorisation médicale antidatée qui permet au Texan de passer entre les gouttes.
Lors des deux premières semaines du Tour, Armstrong, Hamilton et Livingston utilisent de l'EPO « tous les trois ou quatre jours ». Les seringues usagées sont jetées dans des sacs ou des canettes de Coca et le Dr Del Moral se charge de les faire disparaître le plus vite possible. Armstrong et Hamilton se font également des bains de bouche avec de l'« oil », une mixture composée d'huile d'olive et d'Andriol (testostérone), fabriquée par Ferrari.
Avec un tel régime, Armstrong marche fort et roule « avec deux doigts dans le nez », comme le dit joliment Hamilton. Sa domination étonne mais le peloton est muet, à l'exception du jeune Christophe Bassons, un coureur français de la Française des Jeux qui exprime ses doutes, ce qui lui vaudra de sérieuses remontrances de la part de celui qui n'est pas encore le patron absolu du peloton. Armstrong remporte pour la première fois le Tour de France. Sûr de lui, il se dira ensuite « persécuté » et clamera haut et fort qu'il ne s'est « jamais dopé ».
2000, transfusé avant le Ventoux
A l'avant-veille de l'étape du Ventoux, où il laisse gagner Marco Pantani, Lance Armstrong se fait réinjecter dans sa chambre d'hôtel son sang prélevé un mois avant.
Cinq membres de l'US Postal (George Hincapie, Tyler Hamilton, Frankie Andreu, Levi Leipheimer et Christian Vande Velde) ont témoigné sur le dopage au sein de leur équipe en 2000. L'Agence américaine antidopage (USADA) a aussi reçu le témoignage du coureur italien Filippo Simeoni sur les évènements de cette année.
La victoire de Lance Armstrong dans le Tour de France 1999 a été acquise «avec un usage d'EPO tous les trois ou quatre jours», selon Tyler Hamilton. En 2000, la rumeur court qu'un nouveau test EPO sera bientôt mis en place. L'équipe décide donc d'adopter un programme de dopage sanguin pour ses trois grimpeurs, Lance Armstrong, Tyler Hamilton et Kevin Livingston.
Johan Bruyneel informe Hamilton au cours du Critérium du Dauphiné libéré - qu'il va d'ailleurs remporter - que 500 cc de sang seront prélevés sur chacun d'entre eux et réinjectés pendant le Tour de France. Comme les transfusions sont alors indétectables, la tricherie est sans risque. Après la course, Hamilton rallie Valence, en Espagne, en jet privé depuis Nice avec Armstrong et Livingston. Le prélèvement, qui durera une heure, a lieu en présence de Johan Bruyneel, Michele Ferrari, le docteur Del Moral et le soigneur Pepe Marti. Après la ponction, les trois coureurs partent s'entraîner. «On ne se sentait pas comme des champions, rapporte Hamilton. On a été rapidement fatigués, on pouvait à peine monter des petites collines.»
Après la 11e étape du Tour, au soir du jeudi 11 juillet 2000, à l'hôtel l'Esplan de Saint-Paul-Trois-Châteaux (Drôme), les trois coureurs sont transfusés. «Le processus a duré moins de trente minutes, explique Hamilton. On était dans une chambre avec Kevin et Lance dans la chambre d'à côté qui communiquait avec la nôtre par une porte. Pendant la transfusion, on le voyait. Le docteur Del Moral faisait des allers-retours pour vérifier l'avancement de la réinjection. Chaque poche de sang était accrochée au crochet d'un cadre ou collée sur le mur, on était allongés sur le lit et on tremblait pendant que le sang froid "réentrait" dans nos corps. On plaisantait à propos du corps qui absorberait le sang le plus vite.» Le 12 juillet, c'était jour de repos sur le Tour, et le 13 l'étape du mont Ventoux qu'Armstrong allait terminer à la deuxième place derrière Marco Pantani.
2001, aussi vite que « Schumi »
Les rapports entre Armstrong et le sulfureux Dr Michele Ferrari, surnommé « Schumi », éclatent au grand jour lors du Tour de France 2001.
«Oui, le docteur Ferrari a un rôle dans l'équipe. Mais je n'ai jamais discuté d'EPO avec lui, et je n'ai jamais utilisé ce produit. De ce que j'ai vu, je ne pense pas qu'il soit coupable.» Alors que le Tour de France 2001 va s'élancer le 7 juillet, Lance Armstrong essaie de désamorcer un article à paraître le 8 juillet dans le Sunday Times londonien. Le papier révèle ses rapports avec le sulfureux Dr Michele Ferrari, soupçonné de «fraude sportive et d'avoir administré des substances dopantes», et en attente d'un procès en Italie. Ces pratiques supposées ont valu un surnom à Ferrari : "Schumi", en référence à Michael Schumacher, qui a roulé pour l'écurie italienne du même nom.
Les affirmations d'Armstrong sont balayées par les témoignages de plusieurs de ses anciens équipiers (*), auprès de l'Agence américaine antidopage (USADA). Pour Christian Vande Velde, à ce moment, «Ferrari est déjà connu dans le peloton pour utiliser de l'EPO». Ce qui provoque l'incompréhension du directeur sportif de l'équipe, Mark Gorski, quand il voit débarquer le médecin au camp d'entraînement de début de saison de l'US Postal à Austin (Texas).
Lors du camp, le patron de l'équipe Johan Bruyneel annonce des rendez-vous individuels avec Ferrari. Chaque coureur qui veut être suivi devra donner un pourcentage de son salaire annuel au médecin. George Hincapie rapporte que ce montant s'élèvera pour lui à 15 000 dollars.
Un laboratoire ambulant
«De 1999 à 2005, le docteur Ferrari joue un rôle majeur au sein de l'équipe US Postal et dans le programme de dopage de Lance Armstrong», affirme le rapport de l'USADA. Un dopage qui prend plusieurs formes : les transfusions sanguines, l'usage d'EPO ou encore de testostérone.
Hincapie, qui avoue ses propres pratiques dopantes, dit avoir eu des discussions avec Lance Armstrong ne laissant aucun doute sur son recours régulier aux transfusions. Tyler Hamilton affirme avoir vu le champion américain utiliser de la testostérone et rapporte qu'il aurait aussi trafiqué de l'EPO. Lors d'un autre camp d'entraînement, à Tenerife, Hamilton raconte aussi que le Dr Ferrari «m'administrait tous les deux à trois jours de l'EPO dans ma chambre d'hôtel». Substance fournie par l'intermédiaire de "Pepe" Marti, l'entraîneur de l'équipe.
Un autre de ses anciens coéquipiers, Jonathan Vaughters, se remémore une discussion avec Armstrong, en 2001 à Gérone, où celui-ci disait «savoir comment fonctionne le test de dépistage de l'EPO», et comment y échapper.
2002, l'idylle avec Landis
Suite au départ de Tyler Hamilton de l'US Postal, Lance Armstrong s'appuie sur Floyd Landis pour remporter son quatrième Tour de France. Il l'initie à tout, notamment au dopage.
Lance Armstrong a décidé de faire de Floyd Landis, arrivé à l'US Postal en 2001, l'un de ses lieutenants. La majeure partie de la préparation du Tour 2002 (comme d'ailleurs les Tour 2003 et 2004) s'est faite avec Landis qui était le grimpeur sur lequel il pouvait s'appuyer lors des étapes de montagne.
Pendant les trois années durant lesquelles ils furent proches, «à se faire confiance et s'aimer» comme dit Armstrong, Landis et Armstrong partageaient l'entraînement, les courses, les soirées et le dopage. Comme l'ont confirmé beaucoup de témoins, Armstrong avait donné les clefs de son appartement à Landis qui surveillait les poches de sang d'Armstrong pendant son absence. Ils partageaient les conseils de Michele Ferrari en matière de dopage, et quand Floyd avait besoin d'EPO Lance partageait aussi.
Les débuts de la collaboration de Landis-Ferrari.
En 2002, lors d'un stage d'avant-Tour dans les Alpes, Floyd Landis commence à travailler avec le Dr Ferrari, qui lui prend à ce moment-là un demi-litre de sang. Le médecin italien collabore alors avec l'équipe et, comme l'année précédente, il est présent à Austin lors du premier stage de la saison. Il se fait juste plus discret pour ne pas éveiller les soupçons des médias. Preuve de l'engagement de Ferrari auprès d'Armstrong, en 2002, sa société suisse, Health et Performance, reçoit 150 000 dollars de la part d'Armstrong.
Armstrong et la testostérone
Floyd Landis raconte qu'en juin 2002, peu après le Dauphiné, Armstrong lui a donné, dans son appartement de Saint-Moritz (Suisse), un paquet de patches de testostérone. George Hincapie assure être au courant qu'Armstrong utilisait de la testostérone durant toutes les années où ils étaient équipiers.
Armstrong et le dopage sanguin en 2002
Durant la saison 2002, Lance Armstrong explique à Landis comment utiliser l'EPO et pourquoi le dopage sanguin est nécessaire pour contrer les contrôles anti-EPO. Il a prêté son appartement pour la première transfusion sanguine de Landis par Michele Ferrari. Armstrong se trouvait dans l'appartement lors de cette transfusion et était au courant de ce qu'il se passait. Lors du Tour de France 2002, Floyd Landis fut témoin de la réinjection du propre sang d'Armstrong la veille d'un contre-la-montre individuel. Et Armstrong dit alors qu'il a une seconde poche de sang pour la deuxième semaine. George Hincapie était également au courant.
2003, un cintre et de l'huile d'olive...
Pendant le Tour du centenaire, Armstrong multiplie les transfusions. Sans oublier de prendre des micro doses d'EPO et de la testostérone.
L'année du Tour du centenaire, le docteur Ferrari travaille toujours avec Lance Armstrong. Des relevés bancaires font état de versements de 475 000 dollars sur le compte de sa compagnie. En mai, Floyd Landis se fait prélever du sang par le docteur Ferrari dans l'appartement d'Armstrong, à Gérone, en Espagne. La poche est placée dans un réfrigérateur caché dans le placard de la chambre du Texan, où d'autres poches sont déjà rangées. Peu de temps après, Armstrong qui doit s'absenter pour plusieurs semaines d'entraînement, demande à Landis de s'installer chez lui pour contrôler la température du sang chaque jour et s'assurer qu'il n'y ait pas de coupures d'électricité. Pendant son séjour, Landis verra Hincapie venir faire un prélèvement. Trois semaines plus tard, le docteur Ferrari, selon le rapport, «prélève un autre demi-litre de sang à Landis. Il le fait après avoir d'abord retiré deux demi-litres et réinjecté un demi-litre prélevé précédemment. Il expliquera que le sang est ainsi réinjecté pour garder sa fraîcheur. Car s'il est laissé hors du corps trop longtemps, il se détériore.»
Le bal des transfusions
Juste avant le Tour, Armstrong qui a des invités chez lui, demande à Hincapie s'il peut utiliser son appartement. Il est accompagné du docteur Del Moral. Ce dernier réclame un cintre avant de s'enfermer avec le Texan. Ils resteront 45 minutes dans la chambre, «le temps généralement nécessaire pour réinjecter une poche de sang », selon Hincapie, qui ajoute qu'on «accroche la poche au cintre et le cintre au mur pour faciliter le transfert du sang dans la veine.»
Landis confirme que le 11 juillet 2003, à la veille de l'étape Lyon - Morzine, les coureurs de l'équipe dont Armstrong, Hincapie et lui-même sont transfusés. Le 17 juillet, la veille du contre la montre individuel (Gaillac - Cap Découverte), nouvelle transfusion pour tous. Landis voit aussi, lors de chaque transfusion, Armstrong recevoir de petites doses d'EPO. Ce dernier, pour signaler les réinjections, balance à Hincapie qu' «il est plus lourd de 500 grammes aujourd'hui...» Hincapie certifie aussi que son leader «a également pris de la testostérone tout le temps où nous étions équipiers.»
Une huile d'olive bien particulière
La testostérone, connue sous le nom d'Andriol et dénommée "l'huile" par les coureurs, était dissoute dans une seringue d'huile d'olive et utilisée deux nuits sur trois pendant le Tour. Elle était en vogue dans l'équipe depuis 1999. Landis en recevra aussi pendant la Vuelta 2003. Juste avant l'épreuve, il expliquera aux enquêteurs s'être rendu au domicile d'Armstrong pour y recevoir une boite d'Eprex contenant six seringues d'EPO. Pour l'Agence américaine antidopage (USADA), ces faits démontrent qu'Armstrong était en possession d'EPO et en assurait le trafic cette année-là.
2004, fausse rupture avec Ferrari
En 2004, les pratiques du docteur Ferrari commencent à faire parler. Mais Lance Armstrong tient à rester maître de la situation.
Comme pour les saisons précédentes, l'Agence américaine antidopage (USADA) a récolté de nombreux témoignages sur le dopage dans l'équipe US Postal en 2004 : ceux des équipiers Hincapie, Landis, Barry et Zabriskie ; ceux des coureurs Filippo Simeoni et Tom Danielson ; ainsi que ceux des époux Andreu, Frankie et Betsy. L'équipe américaine enregistre un changement par rapport à la saison précédente : l'arrivée à la place de Del Moral du docteur Pedro Celaya, qui était jusque-là en charge du programme de dopage à la ONCE.
Inquiété en Italie, le Dr Ferrari continue de travailler avec Armstrong
Pour le reste, rien de nouveau. Lance Armstrong continue de travailler avec Michele Ferrari, malgré les démêlés judiciaires de ce dernier en Italie. Dans son témoignage, Floyd Landis rapporte ainsi que le docteur Ferrari était notamment présent à un stage d'avant-Tour de France, à Puigcerda, une localité espagnole où Armstrong avait l'habitude de se réfugier pour éviter les contrôles, afin de vérifier les valeurs sanguines de chacun des coureurs, mais aussi pour «administrer de l'EPO et de la testostérone pour être sûr que l'équipe soit prête pour le Tour». Landis se souvient avoir vu à cette occasion Armstrong allongé sur une table de massage avec un patch de testostérone sur l'épaule, un usage très répandu à l'époque dans l'équipe, comme en a témoigné George Hincapie.
Le 2 juillet, à la veille du Grand départ du Tour, la société de Ferrari reçoit un chèque de 100 000 $ de la part d'Armstrong, satisfait des tests de son équipe. Sur les trois semaines de course, Landis a noté que son leader avait reçu à deux reprises une transfusion sanguine. L'une d'elles a été effectuée dans le bus de l'équipe après une étape, sur le chemin de l'hôtel, et le chauffeur a alors prétexté un problème de moteur pour s'arrêter pendant une heure sur une route de montagne et permettre les transfusions. Celles d'Armstrong auxquelles Landis a assistées, en 2003 et 2004, étaient complétées par une prise d'EPO qui, quand elle est injectée en petites doses, permet de stimuler la production de réticulocytes (globules rouges) et donc de masquer les transfusions. Une pratique courante à l'US Postal.
L'altercation avec Simeoni
En 2000, Filippo Simeoni reconnaît devant une juridiction italienne avoir pris de l'EPO et de l'Andriol sous la direction du docteur Ferrari. En représailles, Lance Armstrong, utilisant sa «position d'icône du sport universellement reconnue», comme le décrit le rapport de l'USADA, lance une campagne contre Simeoni, le traitant de menteur dans les médias. Ce qui poussera le coureur transalpin à attaquer le Texan pour diffamation. Les deux "ennemis" se retrouvent sur le Tour 2004, et Simeoni, coureur de l'équipe Domina Vacanze, se glisse dans une échappée lors de la 18e étape. Mais Armstrong ne l'entend pas de cette oreille, poursuit l'Italien et lui intime l'ordre de rentrer dans le rang, gaspillant là de l'énergie alors que cette sortie ne représentait pourtant aucune menace. De retour dans le peloton, l'Américain sermonne le fuyard : «Tu as fait une erreur quand tu as témoigné contre Ferrari et tu as fait une erreur quand tu m'as attaqué (en justice). J'ai beaucoup de temps et d'argent et je peux te détruire».
Une vidéo, que l'USADA a jointe au dossier, immortalisera le moment où Armstrong passe sa main devant sa bouche pour faire signe à Simeoni de se taire. L'agence américaine voit dans ce geste une «tentative d'intimidation de témoin». Le procès contre Ferrari aboutit toutefois en octobre 2004 à une condamnation pour «fraude sportive» : le médecin italien est accusé d'avoir conseillé plusieurs coureurs de son pays dans leur prise d'EPO et d'Andriol. Cette condamnation oblige Lance Armstrong à annoncer la fin de sa relation avec Ferrari. En 2010, son conseiller Mark Fabiani expliquera que son client n'a plus travaillé avec Ferrari depuis 2004. Une déclaration fausse.
2005, mensonges et malaise
Quand Johan Bruyneel envoie George Hincapie « nettoyer » l'appartement espagnol d'Armstrong qui continue de mentir sur ses vraies relations avec le docteur Ferrari...
Face aux agents de l'Agence américaine antidopage (USADA), Levi Leipheimer se souvient qu'en « 2006 ou 2007, George Hincapie (lui) avait raconté qu'en 2005, Lance Armstrong n'avait utilisé qu'une seule poche de sang sur le Tour de France » (*). Pour l'USADA, qui a transmis son rapport d'enquête sur Armstrong à l'Union Cycliste internationale (UCI), mercredi, Hincapie n'avait aucune raison de mentir à son compatriote, surtout au sujet d'un champion alors retiré du peloton. Les enquêteurs de l'agence en sont d'autant plus convaincu qu'Hincapie leur a confirmé l'existence de cette pratique : « De mes conversations avec Lance et de mon expérience avec lui et l'équipe, je suis au courant qu'il a utilisé les transfusions de 2001 à 2005. » Hincapie évoque aussi l'usage d'EPO : « Peu avant le Tour 2005, j'étais en manque d'EPO et j'ai demandé à Lance s'il pouvait m'en fournir. Il m'a dit qu'il pouvait et m'a donné deux ampoules. »
Après le Tour 2005, son septième succès de rang, Armstrong regagne les Etats-Unis sans passer par sa résidence espagnole de Gérone. Hincapie raconte que Johan Bruyneel, le directeur sportif de Discovery Channel, lui demande alors « de passer dans l'appartement de Lance et de vérifier dans les placards qu'il n'y reste rien ». Selon Hincapie, Bruyneel « voulait s'assurer qu'il ne restait pas de produits dopants », et pour les enquêteurs américains, cette requête de Bruyneel induit que le manager belge savait que son leader améliorait ses performances illicitement en 2005.
« Mais pourquoi a-t-il besoin de mentir ? »
Hormis Bruyneel, l'USADA est convaincue que Michele Ferrari est également compromis. Si Armstrong a juré devant le monde entier, le 1er octobre 2004, qu'il ne travaillerait plus avec le médecin italien, l'agence antidopage dispose d'éléments qui prouvent le contraire. George Hincapie, Levi Leipheimer et Tom Danielson ont tous les trois admis que Ferrari leur prodiguait, en 2005, des conseils d'optimisation dans l'utilisation des substances prohibées. Danielson raconte que cette année-là, il a effectué des tests auprès du Dr Ferrari en compagnie de Lance Armstrong à Gérone : « On a fait une sortie de trois heures, puis on a recommencé et Michele nous a piqué les doigts pour vérifier nos taux de lactate et d'autres paramètres ».
En réalité, il n'y a rien d'illicite dans la relation entre Armstrong et Ferrari. « Mais alors, pourquoi a-t-il eu besoin de mentir sur ce sujet ? questionne l'USADA. S'il n'y a rien à cacher, il n'y a pas besoin de le cacher et certainement aucune utilité à mentir régulièrement à ce sujet ».
Le versement, le 29 mars 2005, de 100 000 dollars sur un compte suisse de Ferrari de la part de l'Américain, le fait que le même mois Armstrong ait présenté Ferrari à Leipheimer et que Lepheimer ait alors reçu immédiatement des conseils sur la façon de se doper de la part du médecin italien, incitent l'USADA à douter de la bonne foi d'Armstrong.
2009, Ferrari aide au come-back
Lance Armstrong n'a jamais cessé de travailler avec le sulfureux médecin italien Michele Ferrari. L'USADA en a la preuve par mails..
Le 9 septembre 2008, Lance Armstrong annonce son retour à la compétition. Jusqu'à l'arrêt définitif de sa carrière le 16 février 2011, il n'a jamais, selon l'Agence américaine antidopage (USADA), cessé de travailler avec le docteur Ferrari, même si son porte-parole, Mark Fabiani, affirme le 15 avril 2010 qu'«ils ne collaborent plus depuis 2004, mais qu'ils restent amis, même s'ils ne sont pas vus depuis un an environ.»
Le rapport assure que «la vérité, c'est qu'ils se rencontrés environ un mois avant cette déclaration, le 17 mars 2010, dans la villa d'Armstrong à Saint-Jean Cap Ferrat, et qu'ils se reverront un mois après.» En 2009, Levi Leipheimer a d'ailleurs demandé à Armstrong s'il travaillait toujours avec "Schumi". Armstrong répond que oui, «à travers une tierce personne». Grâce à l'aide des autorités italiennes, l'USADA a découvert qu'il s'agissait du fils de Ferrari, Stefano Ferrari, qui transmettait régulièrement les plans d'entraînement à Armstrong par mail. De temps en temps, Armstrong communiquait toujours directement avec le médecin.
Voici des extraits de mails :
9 avril 2009. Entraînement en altitude. A L.A. : « Ce sont les bons watts pour l'altitude. Très bons en fait. Cependant, Schumi te conseille d'être prudent à ces altitudes, Ok ? »
25 avril 2009. A L.A. : « Schumi est en train de penser à quelque chose de cool à faire avant le Giro. Un semblant de course tranquille, un truc pour vous les gars... Schumi vous conseille d'être relax. Il suggère de ne pas être obsédé par l'aérodynamique. »
2 mai 2009. A L.A. : « Viens de parler à Schumi. Il dit OK pour juin pour voler sous les radars et se faire un sacré boulot à haute intensité. »
24 mai 2009. Pendant le Giro. De L.A. : « Question : Schumi pense que juin ressemblera à quoi ?
A L.A. : « En juin, tu auras six jours de récupération après le Giro. »
De L.A. : « Seulement six jours ? Vous êtes fous, les gars... »
A L.A. : « Schumi dit pas plus de neuf jours. Tu n'auras pas beaucoup de temps pour t'entraîner pour le Tour. »
17 juin 2009. Entraînement d'avant Tour. A L.A. : « A propos des chiffres que Schumi a écrit, il a une correction à faire :... Schumi pense qu'il est peu probable que tu puisses obtenir un avantage en baissant maintenant le poids de corps, mais il pense que c'est possible de gagner un peu plus en termes de seuil dans les dix prochains jours d'entraînement. »
30 juin 2009. De L.A. : « La question c'est : est-ce que c'est efficace ? On a besoin de quoi pour gagner le Tour ? »
Pendant le Tour 2009, les connexions continuent.
Le 6 juillet, Armstrong reçoit ce conseil : « Schumi suggère de lever la selle de 2 mm. Essaye cet après-midi et dis nous comment tu te sens ? »
Le 22 juillet : « Schumi se demande si ton vélo de contre-la-montre est à la même hauteur que ton vélo de route ? Si oui, il suggère de l'élever de 2 mm. Et si tu te sens encore bas sur le vélo de route, seulement pour l'étape du Ventoux, monte encore de 2 mm. Demain continue à prendre de l'Ibuprofène. »
Le 1er septembre : « Schumi me demande si tu peux faire le paiement (25 000 euros) pour la saison, comme convenu en mars dernier. Tu peux envoyer l'argent quand c'est le mieux pour toi sur mon compte à Monte-Carlo. » Et Armstrong de répondre : « Je peux payer en cash quand je te vois ? »
Le 4 novembre 2009 : « Schumi se demande si tu aimerais poursuivre la collaboration l'année prochaine - si oui, ce serait bien de commencer déjà à penser à quelque chose de spécifique (gym et un peu de vélo). »
Le 15 novembre, Armstrong écrit : « Oui, on continue... ce qu'on a commencé. Je suis curieux de voir ce que Schumi pense de 2010 et ce que nous avons besoin de faire différemment en matière d'entraînement. » Stefano Ferrari répond : « Chouette ! Schumi dit que c'est évidemment un Tour pour des grimpeurs légers... » _________________ NISSA E BASTA ! |
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