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Hatem Ben Arfa : « Je suis dans ma quête »

L'Equipe, le 26/04/2016 à 09h35

De retour au sommet après plusieurs années d'errance, l'attaquant de Nice a raconté sa renaissance à L'Équipe Enquête, le magazine de la rédaction de L'Équipe 21. Il affiche ses ambitions.

- Vous êtes l'homme fort de cette fin de saison en Ligue 1. C'est quoi l'idée : donner des maux de tête à Didier Deschamps ?
(Il sourit.) Non, l'idée, c'est de prendre du plaisir et d'être régulier dans mes performances. On m'a souvent reproché de ne pas l'être. C'était important de me prouver ça, déjà. Après, l'équipe de France, oui, c'est un objectif.

- Pour la première fois depuis très longtemps, vous bénéficiez d'un élan médiatique et populaire qui pousse derrière votre candidature. Vous le ressentez ?
Beaucoup, oui. Quand je viens à Paris, les gens me félicitent dans la rue et me disent que je vais aller à l'Euro, que je dois continuer comme ça. Ça fait vraiment plaisir car ça veut dire qu'il y a un élan et un amour des gens. J'essaie de le leur rendre sur le terrain avec des émotions et du spectacle. C'est donnant-donnant et c'est agréable.

- En fait, vous êtes un peu à la mode. Cela doit vous changer ?
(Il sourit.) C'est sûr. Je n'ai pas souvent été à la mode mais là, je le suis un peu, c'est vrai. C'est bien mais il ne faut pas que ce soit éphémère. J'ai trouvé le bon cadre pour m'épanouir et je pense que plus rien ne va m'arrêter.

- Depuis quelques mois, vous semblez en effet épanoui. On a envie d'ajouter : enfin épanoui.
Enfin, oui. Ma carrière est faite de montagnes russes, avec beaucoup de bas, beaucoup d'épreuves et aujourd'hui, c'est le beau temps qui arrive. J'espère que ça va continuer. En tout cas, je ne vois pas comment ça ne pourrait pas continuer. Je travaille beaucoup, je suis sur ma lancée et ça va être très difficile de m'arrêter.

- À l'été 2014, vous étiez en grande difficulté. Mis à l'écart à Newcastle, vous êtes alors prêté à Hull. Là-bas, rebelote, tout se passe mal. Votre prêt est cassé, vous entrez en contact avec Nice mais votre contrat n'est pas homologué et derrière, vous passez six mois au chômage. C'est un petit miracle de vous voir à ce niveau aujourd'hui.
À Hull, j'étais au fond du trou (il sourit). J'ai vraiment touché le fond. Je voyais noir. J'étais dans un cauchemar. Pour moi, c'était fini. Je me voyais comme un espoir déchu, comme il y en a eu plein et puis je me suis dit que je ne pouvais pas accepter ça. Mais cela a été très, très difficile de relever la tête. Alors oui, on peut appeler ça un miracle. Parce que j'ai bataillé : j'ai vraiment bataillé.

« J'ai toujours cette fragilité, mais je suis fort, aussi.
Je suis très, très fort »


- Lorsque votre contrat avec Nice n'a pas été homologué, début 2015, vous avez eu l'occasion d'aller jouer dans des pays dits exotiques avec beaucoup d'argent à la clef. Pourquoi avez-vous refusé ?
Parce que je n'avais pas accompli ce que je veux accomplir dans le football. Je ne pouvais pas partir comme ça. Bien sûr, il y avait énormément d'argent. Mais je ne suis pas à plaindre de ce côté-là et moi, j'essaye de m'accomplir en tant qu'homme. Cela passe par mon métier de footballeur. J'ai un potentiel, je veux l'exploiter au maximum. On ne va pas se cacher : si j'étais parti, c'était fini. J'aurais eu ça sur ma conscience. Je n'aurais jamais été tranquille. On n'aurait cessé de me dire : "T'avais quand même du talent, t'aurais pu faire mieux." Je n'aurais pas pu l'accepter.

- On l'entend encore.
Oui, et c'est normal. On va l'entendre jusqu'à ce que j'arrive en haut. Je sais le chemin qu'il me reste à parcourir et je donne rendez-vous à tout le monde dans quelque temps. Moi, je sais ce que je fais.

- On vous a souvent reproché de répéter : "J'ai compris, je vais changer."
(Il coupe.) Et ça fait mal, ça aussi. Quand je le disais, j'étais sincère. Le résultat d'aujourd'hui, c'est tout le travail que j'ai fait depuis tout ce temps. Je viens de tellement loin. On ne va pas refaire le monde mais je n'ai pas eu une grosse éducation, ç'a été compliqué pour moi, j'ai été médiatisé très jeune, je n'ai pas eu le temps de me construire. Quand je disais tout ça, je le pensais. Mais l'évolution ne se fait pas du jour au lendemain. Un enfant, il grandit petit à petit. Moi, c'est pareil. Je ne suis pas encore à complète maturité mais j'évolue.

- Dans un entretien que vous nous aviez accordé à Hull, en 2014, vous disiez :
"Je suis fragile."

(Il coupe.) Beaucoup de gens m'ont dit : "Mais pourquoi t'as dit ça ?" Mais moi, quand je parle à la presse, je dis ce que je pense. Et on est tous fragiles, quelque part. Pourquoi cacher qui on est ?

- L'êtes-vous toujours autant ou un peu moins ?
J'ai toujours cette fragilité, mais je suis fort, aussi. Je suis très, très fort. Je suis les deux. C'est ce qui fait ma personnalité.

- Lors de cette interview, vous disiez encore ceci : "J'ai usé tous mes crédits. C'est comme si tu jouais à Super Mario. T'as cinq vies. T'en perds une, deux... Là, il me reste une vie. Je fais vraiment très, très attention. J'ai beaucoup de pression."
(Il sourit.) Je me souviens très bien de cette phrase et on m'en a beaucoup parlé, aussi. Je n'avais plus de vie, en fait. J'étais mort. Mais un bonus est descendu du ciel et m'a permis de poursuivre mon chemin. Bon, c'était une image hein, quand même... (Il sourit à nouveau.) Mais disons que je savais, à ce moment-là, que l'étau se resserrait vraiment.

- Il est immortel Super Mario ?
(Il sourit.) Apparemment, hein !

- À l'époque, vous disiez aussi que vous rêviez encore d'évoluer dans un très grand club et même de gagner le Ballon d'Or. Vous jouiez à Hull. Cela avait suscité quelques moqueries.
C'est comme ça. En général, ceux qui se moquent, ce sont ceux qui n'ont pas de rêve. Ils veulent pourrir les rêves des gens. Moi, je suis dans mon rêve, je suis dans ma quête. Si j'y arrive, j'y arrive. Si je n'y arrive pas, je n'y arrive pas. Mais le plus important, c'est la quête et tous les jours, quand je me réveille, je pense au Graal. Ceux qui critiquent ça, ce sont des losers.

- Aujourd'hui, plus que jamais, vous devez alors rêver de ce Ballon d'Or.
J'en rêvais à Hull. J'en rêvais quand j'ai commencé le football. J'en rêve toujours aujourd'hui. Tant que je jouerai au foot, j'en rêverai.

« Je serais même capable (d'aller à l'Euro)
pour ne pas jouer du tout »


- Malgré l'élan que vous suscitez, il reste du scepticisme autour de vous. On entend que votre caractère pourrait être un frein à votre sélection à l'Euro. Sous-entendu : et s'il pétait les plombs ?
Je l'entends de moins en moins, quand même. Je suis très bien dans ma tête. Je suis là pour accompagner mon équipe à Nice, j'ai un bon état d'esprit, et ce sera pareil si je suis en équipe de France.

- Un malentendu demeure par rapport à l'équipe de France, c'est cet incident avec Laurent Blanc à l'Euro 2012 lorsque vous aviez répondu au téléphone dans le vestiaire. Quatre ans après, cela reste.
À l'époque, des joueurs ont été sanctionnés par la commission de discipline de la Fédération. Pas moi. Laurent Blanc a même envoyé une lettre dans laquelle il écrivait qu'il ne s'était rien passé de grave.

- Mais avez-vous peur que cela vous desserve ?
Si cela doit me desservir, cela me desservira. Je n'ai de reproche à faire à personne. Cela fera partie de mon chemin. Mais je pense que, aujourd'hui, je peux beaucoup apporter à l'équipe de France. Sur le terrain, en dehors.

- Avez-vous parlé avec Didier Deschamps de votre évolution ?
Non. Il a beaucoup d'expérience, il voit ce qu'il se passe, je pense qu'il a aussi des échos du club. Il n'est pas sélectionneur pour rien, il sait ce qu'il fait.

- Cela ne vous inquiète pas ?
Pas du tout, non. S'il ne me prend pas, ce ne sera que sportif.

- On se demande aussi si vous seriez capable d'accepter un statut différent, de jouer dix ou quinze minutes, d'être un joker.
Mais ça veut dire quoi, joker ? C'est n'importe quoi, ce mot. Si le sélectionneur prend 23 joueurs, ce sont 23 joueurs potentiellement titulaires. Si je suis titulaire, je serai titulaire à fond. Si je suis remplaçant, je serai remplaçant à fond.

- Mais vous voyez bien ce qu'il signifie, ce mot. Hatem Ben Arfa serait-il prêt à venir pour jouer dix, quinze minutes ici ou là ?
Mais je serais même capable d'être là pour ne pas jouer du tout.

- Vraiment ?
Oui. Je serais capable d'y aller et même pas jouer une minute, d'encourager tout le monde, de pousser tout le monde à l'entraînement. Il y a l'Euro, mais après il y a les qualifications à la Coupe du monde. Les choses se font petit à petit. Après, bien sûr, si je devais être titulaire, je serais titulaire. Quoi qu'il en soit, je suis prêt à tout donner pour les Bleus.

- En 2008 puis en 2010, vous faisiez partie de la première liste de Raymond Domenech puis vous aviez été écarté au dernier moment. Depuis vos débuts en bleu en octobre 2007, aux Îles Féroé, où vous aviez marqué un but, vous n'avez décroché que quinze sélections. Avez-vous un sentiment d'immense gâchis ?
Bien sûr, oui. Mais il n'est jamais trop tard. Tout peut s'enchaîner rapidement. J'ai besoin de pouvoir contribuer à quelque chose pour mon pays. C'est un accomplissement, ça, aussi.

- Vous êtes en fin de contrat à Nice. Est-il possible de vous voir en Ligue 1 la saison prochaine ?
Oui, c'est possible. Vous aimeriez ? (Il sourit).

- Les gens aimeraient, visiblement.
Aujourd'hui, tout est possible, à part aller en Chine ou un pays comme ça.

- En même temps, en un an, vous avez réussi à radicalement modifier votre image. Le coup parfait, ce serait de partir sur cette image.
Mais je peux encore l'améliorer.

- Si on vous demande si vous pouvez rester à Nice, vous allez dire : "Oui, tout est possible."
Tout est possible, oui, c'est envisageable.

« Je n'ai pas souvent été à la mode
mais là, je le suis un peu, c'est vrai »


- C'est une réponse très politique, non ?
(Il rit.)Non, non, non. C'est vraiment envisageable, surtout s'il y a la Ligue des champions au bout.

- En même temps, être en fin de contrat après une saison pareille, c'est le moment idéal pour signer dans un grand club.
Ça fait partie des possibilités, oui. Bon, je suis politique, là (il sourit).

- Atlético de Madrid, PSG, Liverpool, Chelsea, l'Allemagne, l'Italie : comment vivez-vous cette période agitée ?
Je ne gère pas cela. J'ai des conseillers qui s'en occupent et moi, je me concentre sur les objectifs du club. Je suis vraiment hermétique à tout ça.

- Cela parait impossible.
Mais c'est la vérité. Je suis hermétique. Et ça se voit à travers mes performances. J'aurais pu avoir la tête ailleurs mais non : je suis à fond.

- Vous ne cessez de sous-entendre que vous souhaitez encore marquer l'histoire. C'est impossible que vous n'y arriviez pas ?
On est deux à y croire, maintenant, alors... (Il sourit.) Vous y croyez ou pas ?

- Vous êtes convaincu, en tout cas.
Moi, je suis convaincu.

- Vous êtes convaincant.
(Il rit.) Ah, ça va alors !

- Faites attention : tout le monde va y croire et si ça ne marche pas...
Ça va marcher. Vous verrez...


DÉCRYPTAGE
Le retour de Super Mario
Le principe d'un rendez-vous était prévu de longue date, afin de revenir, notamment, sur un entretien qu'il nous avait accordé à Hull, à l'automne 2014, dans le cadre de L'Équipe Enquête, le magazine de la rédaction de L'Équipe 21. À l'époque, Hatem Ben Arfa s'était comparé à Super Mario, un personnage bien connu des fans de jeux vidéo : dans son esprit, il mettait en jeu sa dernière vie dans ce club anonyme de Premier League où l'aventure se termina mal, comme souvent. Mais cette fois, il avait tort : malgré l'échec, puis six mois de chômage, sa renaissance sportive inattendue avec Nice le place en position d'ambitionner une présence à l'Euro 2016. Apaisé, souriant, heureux, aussi, de cet élan populaire qui pousse derrière sa candidature en bleu, l'ancien Lyonnais développe un discours à la fois mesuré et terriblement ambitieux. Car à vingt-neuf ans, l'ancien prodige du football français rêve encore de Ballon d'Or. C'est ce qu'il nous a confié durant plus d'une heure, samedi, à Nice, sous l'oeil de nos caméras et de celle, en arrière-plan, de Bruno Sevaistre, le réalisateur d'À la Clairefontaine qui avait révélé le jeune Ben Arfa il y a bientôt quinze ans et qui le suit à nouveau, depuis quelques années, dans son quotidien, ses galères et ses rebonds, afin de réaliser un documentaire sur sa vie.


Sébastien TARRAGO
L'Equipe







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   33e  ven. 10/05 (21h) Nice - Le Havre
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